Bien que la théorie de l’effet papillon existe depuis des décennies, ses répercussions dans le monde de l’économie et des finances se manifestent plus intensément et plus rapidement depuis les dernières années.
Quand la Grande-Bretagne a voté son départ de l’Union européenne en juin dernier, les marchés financiers mondiaux ont été secoués par une onde de choc sans précédent, effaçant notamment tous les gains de l’année pour le Dow Jones et le S&P 500 aux États-Unis. Quelques mois plus tard, Trump était élu. Les conséquences de la mondialisation sur l’économie ne se mesurent pas uniquement sur les marchés financiers. Elles bouleversent aussi nos valeurs ainsi que notre vision des modèles socio-économiques en vigueur.
Notre plus récente étude Prosumer, Money Money Mon€y: Attitudes Toward Credit, Consumption, and Cryptocurrency, a sondé quelque 12 000 personnes dans 37 pays sur des sujets d’actualité comme la perception face à l’argent, les nouvelles méthodes de paiement ainsi que notre regard sur la consommation. Il en ressort un grand pessimisme envers le modèle capitaliste et les attentes changeantes face aux systèmes financiers et bancaires.
Une vision pessimiste de l’avenir
Les effets de la grande récession de 2008 se font encore ressentir et nombreux sont ceux qui se déclarent peu confiants face à leur avenir financier. Il n’est donc pas étonnant d’apprendre que 70% des répondants mondiaux se disent inquiets à l’idée de ne plus pouvoir subvenir à leurs besoins quand ils auront atteint l’âge de la retraite.
Les données du rapport confirment d’ailleurs que 67% des Canadiens croient que leurs enfants auront un avenir financier moins radieux que le leur. Le portrait est encore plus sombre du côté de la Chine, où 42% des Chinois croient désormais que leur situation financière va se dégrader dans les années à venir.
Un regard nouveau sur le capitalisme
Depuis la chute du mur de Berlin, il était devenu clair que le libéralisme avait pris le dessus sur le communisme. Cela dit, quelques mois seulement après le Brexit et l’élection de Donald Trump à la tête des États-Unis, le nouveau portrait mondial en matière de politique a de quoi raviver les inquiétudes des partisans du libre-échange mondialisé.
L’effet se fait même ressentir jusqu’au Québec, alors que Sophie Brochu, PDG de Gaz Métro, a récemment lancé un appel à un capitalisme plus doux et humain. Il n’est donc pas étonnant que la population canadienne se sente trahie par le capitalisme, révèle l’étude. Les Canadiens n’ont plus le sentiment que le travail acharné d’une vie leur apportera prospérité, un des principes fondateurs du capitalisme. Par exemple, seuls 30% d’entre eux jugent qu’il existe une corrélation entre le dur labeur et la réussite. Une chose est certaine toutefois, le problème va au-delà du malaise grandissant vis-à-vis l’inégalité de la répartition de la richesse entre les plus riches et les moins nantis.
La valeur changeante de l’argent
Le rapport confirme également que la tendance est au minimalisme et à la simplicité volontaire, des philosophies de vie qui se veulent un antidote à la surconsommation et au gaspillage de nos ressources. Adopter un tel mode de vie dans le contexte économique actuel est également une façon proactive de s’adapter au pessimisme économique ambiant en apprenant à faire des choix. On veut voyager plus souvent? Il faut alors se montrer plus frugal dans nos dépenses au quotidien.
Ce comportement face à l’argent est particulièrement visible au Canada. Même si 65% des Canadiens affirment qu’ils seraient plus heureux s’ils étaient plus riches, pour eux, tout reste une question d’équilibre. L’important, c’est d’avoir suffisamment d’argent pour ne pas avoir à s’en soucier.
Pour les banques, se préparer à l’avenir
Les monnaies émergentes, les nouvelles entreprises de technologie financière (ou fintech) et l’émergence de monnaies alternatives (comme le bitcoin) obligent les banques à se réinventer pour rester compétitives.
Si les Canadiens sont encore convaincus de la pertinence des banques traditionnelles et ne se disent pas prêts à recourir aux nouveaux services bancaires émergents, ils réclament toutefois une plus grande présence de leur banque et s’attendent à ce qu’elle puisse répondre à tous leurs besoins. Quand on sait que seulement 27% des Canadiens voient leur banque comme un partenaire essentiel dans l’accomplissement de leurs projets, il est évident que ces dernières ont encore beaucoup de chemin à faire pour satisfaire leurs attentes.
Par ailleurs, ce nouveau regard que nous portons face à l’argent et la consommation ne devrait pas seulement préoccuper les banques. Pour rester pertinentes dans les années venir, les marques devront elles aussi se montrer plus empathiques envers les nouvelles préoccupations des consommateurs. Que ce soit, par exemple, en s’adaptant aux conditions économiques de leurs clients, comme Everytable, qui offre une tarification du type «payez ce que pouvez», ou en répondant aux préoccupations des consommateurs à la manière d’H&M, qui, affrontant ses démons, propose un service pour recycler vos vêtements «usagés».